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Sociologia

versão impressa ISSN 0872-3419

Sociologia vol.31  Porto jun. 2016

 

ARTIGOS

Comment les psychiatres se représentent-ils aujourd'hui “la” maladie mentale?

Como os psiquiatras interpretam a doença mental?

How do psychiatrics consider nowadays “the” mental illness?

Caroline Guibet Lafaye29
CNRS – Centre Maurice Halbwachs


 

RÉSUMÉ

La littérature médicale propose plusieurs modèles interprétatifs de la maladie mentale. À travers une enquête empirique de type sociologique, nous avons voulu faire émerger du terrain les représentations de la maladie – et en particulier de la psychose –aujourd'hui à l'œuvre, parmi les psychiatres français, ainsi que le degré d'adhésion à celles-là. Nous plaçant volontairement à un degré important de généralité, nous avons mis en évidence sept formes d'attitude face à la question de la maladie mentale.

Mots-clés: maladie mentale, psychose, souffrance psychique.


RESUMO

A literatura médica propõe vários modelos interpretativos da doença mental. Através de um inquérito empírico de tipo sociológico, quisemos fazer emergir as representações da doença - e em particular da psicose - hoje tema de estudo, entre os psiquiatras franceses, assim como o grau de adesão àquelas. Colocando-nos voluntariamente num grau importante de generalidade, pusemos em evidência sete formas de atitude face à questão da doença mental.

Palavras-chave: doença mental, psicose, sofrimento psíquico.


ABSTRACT

The medical literature offers several interpretations of mental disease. We conduct a sociological survey to grasp from empirical data current representations of disease, in particular of psychosis, assumed by French psychiatrists. We choose to ask a general question to medicals. We described seven kinds of attitudes.

Keywords: mental disease, psychosis, mental suffering.


RESUMEN

La literatura médica sugiere una serie de modelos interpretativos de la enfermedad mental. A través de un estudio empírico de tipo sociológico, queríamos llevar a cabo las representaciones de la enfermedad - y, en particular, la psicosis - el tema de hoy del estudio entre los psiquiatras franceses, así como el grado de adherencia a las. nos pone voluntariamente en un importante grado de generalidad, hemos destacado siete formas de actitud con respecto a la cuestión de las enfermedades mentales.

Palabras clave: enfermedad mental, psicosis, sufrimiento mental. Palabras clave: enfermedad mental, psicosis, sufrimiento mental.


CONTEXTE

La littérature médicale comme les sciences humaines et sociales permettent d'identifier plusieurs définitions ou représentations de la ou des pathologies en psychiatrie. Une ligne de partage oppose objectivistes et constructivistes (voir Kitcher, 1997: 208-209). Les premiers considèrent qu'il y a des faits relatifs au corps humain sur lesquels la notion de maladie se fonde et toute personne ayant une claire compréhension de ces faits n'aurait aucune difficulté à tracer des frontières entre ce qui relève de la maladie et ce qui n'en relève pas, même dans les cas difficiles. Les seconds tiennent cette représentation pour illusoire. Les cas difficiles, selon eux, montrent comment les valeurs des différents groupes sociaux entrent en conflit plutôt qu'ils ne traduisent une ignorance des faits, l'accord sur les faits s'expliquant parfois par un consensus autour d'un système de valeurs.
Lorsque l'étiologie est prise en compte, on oppose les psychogenèses aux organogenèses. Les premières appréhendent le symptôme psychiatrique comme intégré à une attitude globale, à une conduite ou à un comportement. Les “ syndromes psychiques ” sont alors décrits comme “des conduites et des croyances d'un certain niveau fonctionnel, (comme) de véritables comportements faits avec la substance, la pâte, de la personnalité.” (Ey, 1934: 164) Le modèle organogénétique, en revanche, explique le trouble mental à partir de ses symptômes (conduites, comportements) par une atteinte physique de l'organisme (lésion, organe, cerveau en particulier). Ainsi, au cours des années 1970-1980, l'étude des mécanismes neuronaux sous-tendant le comportement humain a fondé le développement de la neuropsychologie, laquelle propose une analyse systématique des troubles consécutifs aux altérations de l'activité cérébrale normale dues à la maladie, à une lésion ou à une modification expérimentale. À cette bipartition s'ajoute l'explication par la sociogenèse.
Plutôt qu'à partir de l'étiologie, les représentations de la maladie mentale peuvent être abordées à partir de la façon dont, historiquement, la psychiatrie s'en est saisie. “L'ensemble de la psychiatrie de l'Europe occidentale et de l'Amérique du Nord peut s'étudier (…) comme la succession de trois périodes, marquées (…) par la prévalence d'un paradigme (cf. Kuhn, 1962) qui régit toute la pathologie mentale correspondante ” (Lantéri-Laura, 2005: 36). La première s'étend de 1793 à 1854 et se caractérise par la mise en œuvre du paradigme de l'aliénation mentale, qui oppose l'aliéné au non-aliéné, le fou au non fou, sans position tierce. Y succède, de 1854 à 1926, le paradigme des maladies mentales au pluriel, irréductibles les unes aux autres. Émerge enfin en 1926 – date du congrès de Genève-Lausanne sur la schizophrénie – le paradigme des structures psychopathologiques qui s'efface en 1977 avec la mort d'H. Ey. La notion de structure est au cœur de ce paradigme et réorganise la multiplicité des pathologies qu'avait mise au jour la précédente période. Depuis 1977, nous serions entrés dans la psychiatrie “postmoderne”, dont nous ne savons pas s'il lui correspond un paradigme (Lantéri-Laura, 2005: 40).

OBJECTIFS

Face à cette diversité explicative et au fait que la psychiatrie contemporaine puisse se résoudre en une “ juxtaposition de syndromes ” (Lantéri-Laura, 2004: 130), notre objectif est d'en explorer le champ, en particulier dans les formulations que les médecins proposent pour appréhender les sujets malades, au-delà et indépendamment de la seule identification de leurs symptômes. Plutôt que de nous appuyer sur la distinction classique entre conceptions organogénétiques et conceptions psychogénétiques de la maladie mentale, nous avons voulu faire surgir des discours eux-mêmes, les représentations de la maladie mentale à l'œuvre dans la pratique clinique. Cette méthodologie permet de ne pas projeter a priori des représentations ou des conceptions de la maladie sur celles que formulent les acteurs, cette dernière démarche ayant le travers d'occulter des représentations minoritaires ou marginales. Elle coïncide avec une approche inductive, de type bottom-up. De plus, la dichotomie entre organogenèses et psychogenèses a le défaut de réduire la question des théories à celle des étiologies (voir Schaffner, 2008), et de surcroît à celle des étiologies considérées comme réactionnelles. Or l'étiologie n'est pas l'unique fil directeur d'organisation taxinomique. Il l'est encore moins lorsque ce ne sont pas les pathologies qui sont étudiées mais les représentations portant sur ces dernières.
Notre objectif est donc double : il s'agit à la fois de dresser une typologie de ces représentations et de saisir leur distribution dans le champ de la psychiatrie clinique contemporaine. Une question reste pendante : qu'est-ce qu'une typologie, issue d'une méthodologie en sciences sociales, peut apporter face aux modèles d'interprétation de la maladie mentale élaborés par la littérature médicale1 ? Sachant que les médecins interrogés se meuvent au sein du champ représentationnel des interprétations courantes de la maladie mentale, notre objectif consiste à la fois à cerner la prégnance de ces représentations mais également à identifier les caractéristiques sociodémographiques de ceux qui les endossent. Nous éluciderons l'impact contemporain des représentations alternatives et issues des courants ayant voulu infléchir la psychiatrie dans les années 1970. Nous apprécierons le poids de la psychiatrie biologique dans le paysage médical institutionnalisé français actuel. Nous préciserons enfin la spécificité du champ eprésentationnel français concernant les interprétations de la maladie mentale.
Du fait de la structure de l'échantillon, nous envisagerons plus spécifiquement le critère du lieu d'exercice, lequel permet de distinguer des catégories de praticiens, selon qu'ils exercent en milieu hospitalier2 , dans une structure privée ou en cabinet mais également, concernant la première catégorie, selon que leur activité se déroule en intra- ou en extra-hospitalier. L'attention au lieu d'exercice est motivée par deux hypothèses, d'une part, celle de l'existence de différences de culture en chacun de ces lieux et, d'autre part, celle du choix par les médecins de leur lieu d'exercice en lien avec l'idée qu'ils se font de la folie et de la réponse médicale qui doit lui être apportée. Un second critère sera retenu, celui de la position hiérarchique (interne, psychiatre, praticien hospitalier en psychiatrie, psychiatre en libéral, psychiatre en SMPR, psychiatre psychanalyste, psychiatre chef de pole, psychiatre chef de service), donnant également dans certains cas une idée de l'âge de l'enquêté3 .

METHODES

Les données que nous avons analysées sont tirées d'entretiens semi-directifs menés, entre octobre 2012 et juillet 2013, auprès de 90 psychiatres exerçant dans des structures de différents types : hôpitaux publics (dans leur variété4 ), cabinets en ville, et dans des contextes géographiques variés (métropoles urbaines, milieu rural). Parmi les personnes interrogées, 4 étaient internes, 4 médecins avaient une activité exclusive en psychiatrie-précarité, 9 exerçaient en prison, 8 exerçaient principalement en libéral5 . Le plus jeune avait 26 ans. Deux venaient d'entrer en retraite, deux autres étaient retraités.
58 étaient des hommes, 32 des femmes. Les entretiens approfondis de type semi- directifs ont été menés avec une grille standard, préalablement testée lors d'entretiens pilotes. Ces interviews ont duré entre 30 mn et 3h30. Elles ont été enregistrées et retranscrites. Tous les entretiens ont été soumis à une analyse individuelle à partir d'un codage thématique, permettant d'identifier des régularités dans les discours. Cinq thèmes ont été retenus : la maladie, la capacité à prendre des décisions pour soi-même – en lien avec le libre arbitre –, le bien du patient, les objectifs thérapeutiques du médecin, la question éthique. L'étude proposée s'appuie sur l'analyse des réponses à la question :

“Si vous aviez à expliquer à un néophyte ce qu'est la maladie mentale, comment la décririez-vous?” qui a été posée à la fois dans le questionnaire diffusé auprès des médecins, en complément des interviews réalisées, et abordée lors des entretiens semi- directifs. L'analyse a été complétée par l'étude thématique du contenu abordé par les enquêtés lors des entretiens.

RESULTATS

Les discours recueillis permettent de dresser une typologie à 6 + 1 entrées, chacune constituée de deux à cinq sous entrées. Chaque entrée retient le trait principal caractérisant la représentation proposée de la maladie, ce trait étant irréductible aux autres descriptions mentionnées. Nous traitons des représentations des formes les plus sévères de la maladie mentale, i.e. de la psychose. Sept thématiques émergent : l'absence de caractérisation de la maladie mentale, l'approche médicale, l'interprétation dite individuocentrée, la référence au symbolique, à une différence ou bien à une altérité, enfin une approche holiste.
Cette typologie constitue une épure qui identifie des idéaux-types au sens de Max Weber (1922), c'est-à-dire des hypothèses dont les éléments de base sont les représentations des agents, sur le fondement desquelles ils déploient des relations causales compréhensibles, permettant de s'orienter dans la réalité sociale ainsi que dans leur pratique, en leur donnant sens. Les types idéaux ne sont pas pensés sur un a priori de déductions exclusivement logiques et définitionnelles, mais construits à partir de la réalité sociale, en l'occurrence des discours recueillis et dont, par synthèse et abstraction, nous avons choisi, extrait et accentué des caractéristiques jugées représentatives de certains univers de discours. L'étude sociologique est contrainte d'élaborer des types (ou “idéaux”) “purs”, exprimant “l'unité cohérente d'une adéquation significative aussi complète que possible” (Weber, 1922: 49), mais qui, pour cette raison, ne se présentent pas dans la réalité sous cette forme pure, absolument idéale. Indéniablement, peu d'individus adhèrent à des modèles “purs” d'interprétation de la maladie mentale. Rares sont les médecins ayant une interprétation mono-causaliste des pathologies mentales. L'analyse thématique permet toutefois de répartir les discours recueillis, en extrayant le trait dominant à partir duquel les subsumer dans des catégories ou épures.

ANALYSE DES RÉSULTATS

1. TYPOLOGIE DES REPRESENTATIONS DE LA MALADIE MENTALE

 		Ne pas caractériser la maladie mentale (entrée 0)

26 médecins sur les 90 ont choisi de ne pas caractériser la maladie mentale soit (0.1) par refus de répondre à la question ou par aveu d'impuissance (n = 21) , soit (0.2) parce qu'ils en ont privilégié une description métaphorique (n = 2) , soit (0.3) parce qu'ils récusent l'existence même de la maladie mentale (n = 3) 6 . Cette entrée recouvre donc des attitudes diverses, allant de l'abstention à une posture d'engagement militant. On considère métaphoriquement (0.2) que “La folie, c'est de voir la vie telle qu'elle est...” (P.A., questionnaire)7 ou bien on assume (0.3) que “La maladie mentale” n'existe pas. Il y a des personnes qui présentent des troubles mentaux à un moment de leur vie.” (J.R.) ou encore que : “Je ne sais pas ce qu'est la maladie mentale. Les patients m'apprennent la diversité des processus humains.” (Y.A.)8 , ces prises de position
définissant l'attitude de celui qui les endosse dans le champ de la psychiatrie. Cette dernière posture présente des variantes consistant à “parle(r) d'“épisodes délirants” et (à) refuse(r) de poser le diagnostic de schizophrénie, ou encore à utiliser le terme de “déséquilibre” plutôt que de maladie (N.B.). Cette orientation s'est incarnée historiquement dans l'antipsychiatrie britannique (Cooper, 1967 ; Laing, 1970 ; Laing et Cooper, 1972) et italienne (Basaglia et Scritti, 1953, 1968 ; Basaglia, 1970 ; Basaglia et Basaglia-Ongaro, 1971), récusant l'existence de la maladie mentale ainsi que toute classification des maladies mentales. Aux antipodes de cette réserve face à la question de la définition/interprétation de la pathologie psychiatrique, on s'engage activement dans la dénonciation des catégories socialement construites et élaborées par la psychiatrie.
Intermédiaire entre le refus de caractériser la maladie (0.1) et sa description à partir de symptômes (entrée 1) , se dessine une posture, notamment assumée par certains des médecins s'inscrivant dans le modèle médical, consistant à caractériser la maladie par défaut. Cet extrait est en emblématique : (ces maladies)

“ c'est ce que nous on va prendre en charge, comme psychiatres, c'est des maladies, des maladies dont on ne connaît pas encore bien l'origine ; on est à peu près sûrs que toutes sont multifactorielles comme origine… encore qu'on manque de réponses précises, étiologiques sur aucune, c'est pour ça qu'on utilise le terme de “troubles” en psychiatrie plutôt que de “maladies” parce que “maladies”, ça suppose qu'on connaît le facteur étiologique… ” (C.S.)9
 		Le modèle médical (entrée 1)

L'approche médicale et biologique, adossée à un présupposé naturaliste, présente plusieurs aspects selon que (1.1) la maladie est simplement décrite à partir de ses symptômes et comme une anomalie, (1.2) qu'elle est définie par référence à l'aliénation10 et comme exprimant des troubles psychiques profonds, privant un individu de ses facultés mentales. S'inscrit dans cette catégorie toute qualification faisant mention d'une altération passagère du jugement, de la maîtrise de soi, d'égarement. (1.3) Elle intervient également lorsque la maladie est caractérisée par ses aspects biologiques ou génétiques, (1.4) lorsqu'elle est appréhendée, à partir d'un point de vue fonctionnaliste, comme un dysfonctionnement, un handicap ou un défaut de type fonctionnel (voir Zygart, 2014: 177). (1.5) L'évocation de la désorganisation de la pensée constitue une sous-occurrence de la représentation de la maladie comme dysfonctionnement. Cette approche est endossée par 17 des médecins interrogés, lesquels envisagent la maladie soit à partir de ses symptômes (n = 9) ou de son étiologie biologique (n = 6) , soit plus généralement comme une aliénation (n = 2) et secondairement comme un handicap, une inadaptation, un dysfonctionnement. Dès lors, “le malade mental est quelqu'un qui est lui-même empêché par sa maladie. En soignant sa maladie, on le libère.” (F.C.) L'extrait suivant est paradigmatique de ces représentations:

“ Sous maladie mentale, on entend généralement la psychose qui est une maladie du cerveau qui aboutit à des perceptions anormales de la réalité donc à des interprétations erronées des situations et à des comportements inadaptés (sous tendus par ces interprétations erronées). Autre élément important : le malade ne se sent pas malade. ” (I.G., questionnaire)

L'approche organique, prégnante lorsque l'on considère que “ la psychose … est une maladie du cerveau ”, étudie les perturbations cognitives du comportement et les désordres de la personnalité apparaissant après des lésions cérébrales. Plus généralement, le modèle médical vise “ la description d'entités syndromiques fondée sur l'analyse de mécanismes psychopathologiques spécifiques ” (Garrabé, 2002). En effet, depuis la seconde moitié du XXe siècle, la psychiatrie s'est déployée comme psychiatrie psychopathologique.
L'approche médicale de la maladie mentale n'est pas sans lien avec celle qui suit (i.e. entrée 2.) mais en en faisant une entrée spécifique, nous avons voulu mettre en exergue une attitude explicitement revendiquée par certains médecins, identifiée sous l'expression – pour reprendre leurs termes – de “modèle médical”, plaçant l'accent sur les déficiences, les altérations durables des fonctions physiologiques, psychologiques ou mentales, sur les incapacités, envisagées comme des difficultés à réaliser un certain nombre d'actes de la vie courante (voir Wood, 1975). Cette approche, à la différence de la suivante, se veut descriptive mais s'avère normative, alors que la suivante serait plutôt empathique, conformément à une partition que l'on trouve aussi dans l'opposition entre evidence based medecine et value based medecine (voir Fulford, 2004). L'approche médicale, tout en étant centrée sur l'individu, s'attache aux symptômes, aux troubles, aux aspects pathologiques du comportement et à leur correction. Elle se veut objectiviste. La deuxième catégorie proposée dessine, en revanche, une approche également individuocentrée mais attentive aux aspects subjectifs de la vie et de la maladie de la personne.

 		L'individu malade (entrée 2)
En miroir de la description organogénétique objectiviste, se déploie une représentation assumée par à peu près un tiers des psychiatres français entendus (n =34) . Nous la qualifierons d'individuocentrée. L'approche psychogénétique en constitue une illustration emblématique. Cette catégorie se décline en cinq sous entrées11 selon que (2.1) la maladie est simplement décrite comme la modalité d'un vécu12 (n = 1) , (2.2) présentée comme une souffrance vécue par le sujet (n = 11) , (2.3) le résultat d'un conflit inhérent au psychisme individuel (n = 15) , (2.4) une perte du sujet (n = 1) , envisagé comme “assez peu sujet de ses actes, des situations dans lesquelles on est”, ou enfin comme (2.5) une “pathologie de la liberté” (n = 6) .
La référence à la souffrance (2.2) en tant que modalité caractérisant la maladie mentale émerge, dans le discours psychiatrique français13, à partir des années 1990. Un basculement s'y opère, de l'accent placé sur la violence ou l'agressivité des patients psychiatriques, à l'attention portée à la souffrance psychique, à la singularité et à la spécificité de l'expérience du malade et des émotions induites (voir Coffin, 2011 :10). Dans les entretiens, cette posture appert lorsque l'on estime que “la maladie mentale (…) est une forme extrême de la souffrance psychique qui est la mobilisation de défenses psychiques face à des situations vécues comme intolérables et menaçantes pour l'intégrité du sujet.” (J.M.) Ainsi 12 médecins mentionnent explicitement la notion de souffrance psychique.
Dans la mesure où l'enjeu aujourd'hui est de “montrer à travers la souffrance psychique que l'intention psychiatrique est d'être un dépassement d'une approche médicale qui demeure légitime mais insuffisante” (Coffin, 2011 :10), il nous a semblé pertinent de mettre en regard les représentations 1. et 2. de la maladie mentale. L'évocation de la souffrance des patients – plutôt que de la souffrance psychique – est très prégnante dans les discours. 12 femmes sur l'ensemble des 32 interrogées (c'est-à- dire 37 %) l'évoquent à un moment ou à un autre de leur caractérisation de la maladie mentale et 17 hommes sur 58 (i.e. 29 %)14. La souffrance mise en avant, y compris par certains médecins chercheurs en sciences cognitives, peut être comprise comme le fruit d'une altération du vécu intime générant de la souffrance” (N.F.). On considère alors que le fou n'est pas “un aliéné à enfermer, mais un homme en souffrance dont le lien social est altéré, susceptible d'être écouté et soigné.” (Durand, 2011 :44).
L'interprétation psychogénétique (2.3) constitue également une représentation individuocentrée de type subjectiviste de la maladie mentale, au même titre que la lecture psychanalytique, ou des descriptions de la psychose comme un éclatement du sujet15 et du symptôme comme jouissance singulière. L'approche psychogénétique s'illustre aussi bien dans la littérature que dans les discours recueillis, en l'occurrence dans l'idée d'une atteinte incontrôlée du psychisme qui prend le dessus sur les pensées et les actions ” (H.N.). Ce type de représentation présuppose que “deux systèmes de pensée s'opposent dans le délire, et que l'issue dépendra de leurs forces relatives.” (Bottéro, 2011) Historiquement H. Ey (1975) appréhendait le champ de la psychiatrie comme articulé entre des déstructurations de la conscience et des déstructurations de la personnalité. Les premières concernent notamment les psychoses aiguës, avec la manie et la mélancolie, les bouffées délirantes et les états oniroïdes, les états confuso- oniriques. Les secondes regroupent les déstructurations diachroniques de la conscience de soi, c'est-à-dire les différents degrés de désorganisation du système de la personnalité, i.e. le moi devenu démentiel, le moi psychotique du délirant, le moi névrotique et enfin le moi caractéropathique, fixation originaire de la personne entravant la liberté de ses changements éventuels (voir Ey, 1973). Cette caractérisation revêt une place prépondérante parmi les médecins interrogés.
Nous avons placé l'interprétation de “la maladie mentale comme pathologie de la liberté ” (2.5), également héritée d'H. Ey (1948 :57), dans la deuxième catégorie thématique car cette description n'implique qu'un rapport du sujet à lui-même mais elle pourrait être subsumée sous d'autres thématiques dans la mesure où elle évoque aussi un rapport à un comportement ou à un agir, et se voit fréquemment associée à l'idée d'un dysfonctionnement. Cette détermination trouve alors un lien avec l'approche médicale pour autant qu'elle exploite la notion de capacités ou de fonctionnalités (voir Sen, 1985). La maladie consiste alors à “être privé de sa liberté”, c'est-à-dire d'un de ses fonctionings16, c'est-à-dire de performances et d'aptitudes (capabilities) de l'individu, le présupposé étant que ce dernier est un sujet libre plutôt que déterminé. La mobilisation de cette représentation intervient dans une dizaine d'entretiens, en particulier chez des médecins séniors.

 		Un défaut de symbolization (entrée 3)

En marge de ces représentations largement partagées de la maladie mentale se déploie une interprétation faisant référence au langage et au symbolique. Cette caractérisation se distingue de la précédente en ce qu'elle explique la maladie mentale à partir du langage plutôt que du psychisme. Dans notre échantillon, très peu de médecins (n = 2) font de cette interprétation l'axe dominant de leur appréhension de la maladie mentale. Deux sous entrées peuvent cependant être distinguées selon que l'accent est porté sur (3.1) un “défaut de symbolisation” (O.L.), une “perte du lien symbolique” (B.S.)17 et, lorsqu'il est question de psychose, sur “un trou dans ce qui constitue le champ symbolique, le langage au sens le plus large, ce qui fait loi.” (A.L.), ou bien selon que l'on envisage (3.2) la schizophrénie comme le produit de messages linguistiques contradictoires.
Cette dernière interprétation s'illustre dans la littérature et la tradition psychiatriques avec l'école de Palo Alto pour laquelle lorsque l'un des membres du groupe familial reçoit, dès l'enfance de manière répétée et durable, des messages de type digital, i.e. de nature symbolique18, dont le sens se trouve contredit, soit par certains de ces messages eux-mêmes, soit par des messages analogiques, en particulier non verbaux, en somme lorsque l'information qu'il reçoit dit le même et son contraire, le sujet n'a pas d'autre issue pour survivre, fût-ce a minima, que de devenir ce que la clinique traditionnelle appelle un schizophrène chronique.

 		Une différence (entrée 4)

La rupture dans le commun peut n'être pas envisagée seulement eu égard au langage et à l'univers symbolique mais, plus généralement, par rapport à la norme ou aux normes (voir Scull, 1981). L'altérité s'incarne objectivement (ou extrinsèquement) dans une norme ou, subjectivement (et intrinsèquement), dans le “moi sain”. S'ouvre alors l'espace de la représentation de la maladie mentale comme une différence susceptible de se décliner selon une pluralité de références, c'est-à-dire par rapport à une norme aussi bien biologique – la maladie est alors anomalie – que sociale (4.1). La maladie est “une anomalie du comportement ou de la conduite sociale ou du raisonnement, et pour les formes sévères , les trois anomalies associées” (S.K.). Cette catégorie se distingue spécifiquement de l'approche médicale entrée 1 , dans la mesure où la différence soulignée peut être décrite et appréhendée autrement que comme une altération ou un dysfonctionnement que la médecine aurait pour fonction de corriger. Cependant cette représentation est portée par un faible nombre de médecins (n = 4) . Elle dessine la ligne de partage entre l'orientation propre au monde médical et des représentations davantage présentes en sciences humaines.
Elle s'exprime toutefois chez certains médecins dans l'idée que la maladie mentale constitue une “perception des relations à autrui et du monde environnement venant s'écarter de la “norme” et ayant des conséquences dans la capacité de cette personne à être autonome, à développer sa vie familiale, affective, professionnelle.” (H.M.) Déjà, Erving Goffman proposait une définition sociologique de la folie, telle que le malade mental est quelqu'un “qui enfreint les règles communes de l'interaction sociale ” (Goffman, 1973 :322). Cette détermination est également présente dans la littérature francophone considérant que “la maladie est définie par rapport à une moyenne, à une norme, à un “pattern” et que, dans cet écart, réside tout l'essence du pathologique ” (Foucault, 1954 :73) Ici la folie “c'est tout ce qu'on ne comprend pas et c'est tout ce qui sort de l'ordinaire” (P.A.).
Une sous entrée s'associe à cette représentation, en l'occurrence l'idée que (4.2) la maladie mentale traduit une altérité intériorisée, dont la représentation la plus courante consiste dans le fait “d'être étranger à soi-même, de perdre la capacité, la possibilité d'être le guide de sa propre existence.” (O.C.) ou encore dans l'idée d'une “zone d'altérité psychique inductrice de symptômes, avec souffrance psychique reconnue comme telle.” (O.H.).

 		L'écart à la norme (entrée 5)     

Un cinquième type de représentation, proche du précédent et également minoritaire (n = 5) , consiste à envisager la maladie en référence à quelque chose d'extérieur, à une altérité19. Il se distingue de la représentation individuocentrée, qui envisage la maladie comme émanant de ou inhérente au sujet, et du quatrième type, articulé autour de la notion de différence. Ici la maladie apparaît comme (5.1) une pathologie de la relation20 (n = 4) , comme (5.2) le fait de n'être pas dans le monde commun (n = 1) voire (5.3) d'être étranger à soi-même21, c'est-à-dire d'avoir intériorisé une forme d'altérité, le fou étant “la personne qui ne s'appartient pas complètement, c'est avoir une part de soi qui est étranger.” (T.A.) La folie ici, c'est “tout ce qui échappe à la norme, au bon sens… c'est-à-dire tout ce qui fait achoppement, tout ce qui fait effraction, tout ce qui fait désordre… à la fois dans le champ psychique personnel et dans le champ social.” (O.B.) (5.1) Les individus sont alors “aliénés au sens de la rupture du lien” (F.C.), frappés par des “pathologies de la relation. (…) il y a un certain nombre de gens qui, pour des raisons x ou y, sur lesquelles les spécialistes se disputent depuis deux cents ans et c'est pas fini, ça fait même plus que ça – ces gens sont affectés dans différents aspects de leur vie, et le plus visible c'est le domaine des relation interhumaines et en général c'est quand ça pêche dans le domaine-là qu'ils sont amenés à être contraints à des soins, quand eux-mêmes n'arrivent pas à les demander. Après, pour moi-même, je suis beaucoup moins catégorique que ça; je suis moi-même évidemment, j'ai absolument pas de thèse ou d'opinion de quoi que ce soit tranchée là-dessus.” (I.S.) La maladie induit alors “une difficulté à être dans le monde, une difficulté à être avec les autres, une difficulté à être avec soi-même…” (B.G.).
(5.2) Ne pas être dans le monde commun signifie, pour la psychose en particulier, que “c'est un état psychique où la réalité vécue est pas… forcément la même que la majorité de la population. Il peut y avoir une distorsion des perceptions du monde extérieur… En général, la perception du monde extérieur est identique au niveau sensoriel mais c'est l'interprétation qui en est faite qui est différente. Donc il y a cette question de la réalité, du réel, comment est perçu le réel ? Il est perçu différemment dans la psychose.” (N.B.) Bien que la perception du monde extérieur soit identique au niveau sensoriel, l'interprétation par le malade en est différente, de sorte que “le réel, la réalité est perçue différemment dans la psychose.” (N.B.22). Cet état induit “ une difficulté à partager, à être dans un monde de partage, à partager tout ” (T.R.23). Cette représentation sert parfois de point d'appui pour la critique de l'interprétation clinique de la maladie mentale comme désorganisation de la pensée24. Elle trouve un écho dans la littérature, lorsque les troubles mentaux sont désignés comme “ des troubles du lien social” (Gonon, 2013 :292).
(5.3) L'intériorisation de l'altérité est enfin mise en exergue pour souligner que la maladie revient à avoir perdu la capacité ou la possibilité d'être le guide de sa propre existence (voir citation supra d'O.C. et S.S.). La littérature souligne cet aspect, lorsqu'elle considère qu'” à la base de tout délire, on retrouve un étranger, un xénos ” (Kapsambelis, 2013 :753).

 		L'approche intégrative et holiste (entrée 6)     

Un dernier type de représentation de la maladie mentale use d'une approche holiste et compréhensive. En particulier, lorsque le lien social est envisagé plus largement – que dans la représentation 5 – comme un système de rapports sociaux, (5.1) la maladie mentale apparaît comme un phénomène bio-psycho-social (Engel, 1980). Dans cette logique, (5.2) elle se voit également interprétée en référence au modèle systémique (Bateson et al., 1956; Elkaïm, 1995), à (5.3) l'approche culturaliste (Kardiner, 1939) ou au modèle de sociologie-génétique. Ces deux premières sous- entrées envisagent la folie comme le résultat d'un ensemble de rapports intersociaux ou intrafamiliaux25, la personne malade n'étant que le symptôme d'un système de relations plus large. (5.1) Peu de médecins (n = 2) font explicitement référence au modèle bio- psycho-social pour désigner le trait majeur de leur représentation de la maladie mentale. La meilleure illustration en est donnée par cet extrait de réponse au questionnaire :

“Le terme générique de maladie bio-psycho-sociale correspond à l'approche médicale intégrative des différentes composantes à l'intérieur de la psychiatrie (qu'on pourrait considérer comme un mille-feuille (!)) où chaque approche théorique coexiste avec les autres avec son degré de pertinence et les conséquences thérapeutiques qui en découlent.
Si on prend l'exemple de la dépression : vulnérabilité biologique différente selon chacun (comme pour l'hypertension par exemple) et interagissant avec le “social” ou le contextuel (dans un autre discours, les événements de vie). La dimension psychologique correspondant à l'histoire du sujet et la manière dont le franchissement des étapes de la vie telles que la relation, l'abandon sont aussi différentes selon chacun (…]. Les trois niveaux interagissent entre eux. (…) Par ailleurs la répétition d'événements de vie difficiles sollicite d'autant plus la vulnérabilité biologique.» (F.J.)
(5.2) D'autres diront qu'” on peut imaginer que le développement psychique et le fonctionnement psychique, c'est soi-même et c'est le monde qu'on construit autour ”
S.S.). (5.3) Au cours des entretiens, des allusions à la psychiatrie culturaliste s'expriment26, soulignant que “ la folie, c'est un concept culturel qui selon les peuples renvoient à des réalités différentes ” (J.M.), sans néanmoins que les réponses ne rejoignent des affirmations dans ce sens aussi fermes qu'on en trouverait dans la littérature, tenant que “ la maladie serait marginale par nature, et relative à une culture dans la seule mesure où une conduite … ne s'y intègre pas. […] la maladie prend place parmi les virtualités qui servent de marge à la réalité culturelle d'un groupe social ”. (Foucault,1954: 73)

2. ASPECTS SOCIODEMOGRAPHIQUES

D'un point de vue sociodémographique, nous avons distingué 8 catégories professionnelles, en l'occurrence : 1. Psychiatre (n = 21) ; 2. Psychiatre, chef de service (n = 19) ; 3. Psychiatre, chef de pôle (n = 11) ; 4. Praticien Hospitalier en psychiatrie (n= 22) ; 5. Psychiatre psychanalyste (n = 3) ; 6. Psychiatre en libéral (n = 5) ; 7. PU-PH (n = 4) ; 8. Interne en psychiatrie (n = 5). La distribution de l'échantillon étant assez inégale, nous ne pourrons nous prononcer que sur les catégories 1 à 4.
1. Les psychiatres tendront soit à ne pas caractériser la maladie mentale (pour un tiers d'entre eux ; (n = 7) soit à privilégier une représentation individuocentrée (pour un autre tiers ; (n = 6), axée sur le conflit des forces psychiques27. 2. Du côté des chefs de service, cette même représentation est majoritaire (n = 10) mais elle s'oriente soit vers une explication fondée sur le psychisme soit insistant sur la souffrance. 3. Les chefs de pôle, en faible nombre, ont des représentations plutôt fondées sur le modèle médical (n = 4) ou bien s'abstiennent de toute description (n = 3). 4. Enfin, les praticiens hospitaliers en psychiatrie, de fait plus nombreux, assument plutôt des représentations subjectivistes de la maladie mentale (n = 9) – selon les axes de partage que l'on trouve chez les chefs de service – mais aussi se retiennent, pour presque un quart d'entre eux (n = 6), de se prononcer sur ou de caractériser la maladie mentale.
Les profils socioprofessionnels permettant de regrouper les catégories 1. Psychiatre et 4. Praticien Hospitalier en psychiatrie, d'une part, et les 2. Psychiatre, chef de service et 3. Psychiatre, chef de pôle, d'autre part, il apparaît que les premiers – au nombre de 43 – tendent soit à s'abstenir de toute caractérisation (n = 13) de la maladie soit à privilégier une représentation individuocentrée (n = 15) alors que le second groupe, rassemblant 30 individus, assumera, pour presque la moitié d'entre eux, une représentation individuocentrée (n = 13). Lorsque l'on considère le critère du lieu d'exercice, l'échantillon se répartit comme suit. 36 des médecins interrogés exercent en intrahospitalier, 31 en extrahospitalier, 6 en hôpital général, 11 pratiquent dans un cabinet en ville, au moment de l'entretien, et 6 appartiennent à un établissement hospitalier en milieu pénitentiaire. Une partie du premier groupe (médecins en intrahospitalier) partage son temps entre une unité intrahospitalière et un service en extrahospitalier. Dans le cadre de la conduite d'entretiens, nous avons précisé avec eux le titre au nom duquel nous les interrogions, ce qui a permis ultérieurement de les affecter dans la catégorie 1 “médecins intrahospitaliers en service de psychiatrie ”. Nous regroupons dans la catégorie générale d'extrahospitaliers ” (catégorie 2) les médecins travaillant en CMP, dans des centres d'accueil de crise et ceux exerçant, à titre principal, dans des équipes mobiles précarité.
Lorsque leurs représentations de la maladie sont interrogées, les médecins exerçant en intrahospitalier (n = 36) soit se gardent de proposer aucune caractérisation de la maladie mentale (n = 12) soit privilégient l'approche individuocentrée (n = 11). Cette double tendance se confirme si l'on associe à ce groupe de médecins ceux travaillant en SMPR (respectivement n = 14 et n = 13). L'approche individuocentrée, aussi bien chez les médecins exerçant en intrahospitalier que lorsque l'on augmente ce groupe de ceux exerçant en SMPR, est éclatée à travers l'accent porté sur la souffrance du sujet, l'interprétation psychogénétique et la représentation de la maladie mentale comme pathologie de la liberté (n = 4 pour chacune des occurrences).
L'approche individuocentrée est également au cœur des représentations des médecins en extrahospitalier (n = 15), elle s'articule principalement autour de l'évocation du conflit psychique (n = 8). Elle ne fait en revanche aucune place à l'idée de la folie comme pathologie de la liberté. Enfin aucune attitude spécifique, au sein des trois communément adoptée, n'émerge chez les médecins exerçant en cabinet quoique nous n'en ayons entendu qu'un très faible nombre (n = 11).

LIMITES DE L'ÉTUDE

Les médecins ont été approchés pour une étude visant à saisir les incidences de la réforme législative de 2011 sur la pratique psychiatrique et pour appréhender les questions éthiques que suscitait le recours à la contrainte. Certaines des personnes qui ont accepté de nous rencontrer étaient sensibilisées à ces questions davantage que d'autres profils de répondants. L'autre limite de cette étude tient à la méthode de recrutement des enquêtés qui s'est, pour partie, réalisée selon la méthode “boule de neige” (voir Gauthier, 2009) et a pu avoir laissé échapper une partie des médecins se revendiquant de l'approche biologique ou fondée sur l'evidence based medecine. Si ces limites peuvent avoir une incidence sur le nombre de médecins inclus dans chaque type, elles n'en ont en revanche pas sur la nature des types décrits.

CONCLUSION

Comment s'articule aujourd'hui, dans l'univers médical, le champ des représentations de la maladie mentale? L'époque – que G. Lantéri-Laura désigne comme postmoderne – laisse surgir deux tendances fortes, l'une consistant à proposer une clinique qui œuvre indépendamment de toute représentation globale de ce qu'est la folie, l'autre s'appuyant sur une représentation psychogénétique faisant référence au psychisme. La faible prégnance de la référence au modèle médical – n'émergeant que chez 19% des enquêtés – pourrait étonner. Elle ne tient pourtant pas à la méthode de recrutement des enquêtés28 puisque l'essentiel des personnes sont des psychiatres hospitaliers.
Au-delà de la distribution quantitative réalisée à partir de ces entretiens, cette analyse et la typologie qu'elle a mise au jour présentent un intérêt analytique et heuristique pour s'orienter dans le champ des descriptions de la folie aujourd'hui. La référence à la souffrance dans les descriptions et appréhensions de la maladie mentale se voit vérifiée empiriquement, confirmant ainsi ce que l'analyse de la littérature a, pour sa part, mis en évidence (Coffin, 2011). De même, la spécificité du champ français d'interprétation de la maladie mentale fortement marquée par un regard psychodynamique, y compris dans le secteur hospitalier, est une nouvelle fois vérifiée à partir de données empiriquement collectées. Enfin le caractère minoritaire de représentations alternatives aux modèles médicaux et psychogénétiques paraît indubitable au terme de cette investigation de terrain.

 

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Article reçu le 29 juin 2015. Publication approuvée le 10 décembre 2015.

 

Notas

1 Du côté des modèles purs de la psychopathologie, on identifierait le modèle organique, la causalité psychique (psychogenèse), la sociogenèse. Néanmoins les modèles sont, le plus souvent, pluridéterministes, tels l'organo-dynamisme, le modèle cognitivo-comportemental, le modele biopsychosocial.

2 Et plus précisément en hôpital psychiatrique, en hôpital général ou en Centre Médico-Psychologique.

3 Dans la mesure où des critères sociodémographiques n'ont pas été renseignés par certains enquêtés.

4 I.e. soit en service de psychiatrie (qu'ils soient fermés ou ouverts), soit en hôpital général, soit aux urgences, soit comme psychiatre de liaison.

5 Les données sociodémographiques des professionnels de santé sont disponibles sur demande.

6 Certains médecins ont souligné la difficulté inhérente à la question posée. Cette réaction ne nous semble pas invalider sa pertinence parce que, d'une part, le questionnaire adressé à tous les enquêtés offrait du temps pour répondre et, d'autre part, parce que certaines personnes interrogées soulignaient la tendance contemporaine à ce que « depuis plusieurs années, moi je crois que c'est quelque chose qu'on ne questionne plus tellement, qu'on n'aborde plus vraiment comme un problème. Je trouve qu'actuellement on est… dans une identification qui n'est plus questionnant de la folie à une maladie mentale évidemment organique.» (O.B.)

7 «La folie, c'est en fait, en fonction des époques, c'est tout ce qu'on comprend pas et c'est tout ce qui sort de l'ordinaire et, suivant les moments, on le va le regarder sur un mode un peu… éventuellement sur un mode psychopathologique, comme on l'a fait nous ; ça va être aujourd'hui sur un mode plutôt émotionnel et comportemental, c'est-à-dire sur un mode scientifique, soi-disant ; à une époque, c'était sur le mode religieux, donc c'était des gens qui est en communication avec dieu soit en communication avec le diable. (…) On a un cerveau qui s'est énormément développé mais, du coup, dans les tréfonds du cerveau il se passe des choses bizarres et quand elles s'expriment, ça donne des fous.» (P.A.)

8 «(…) la représentation de la pathologie mentale. Je pense pas qu'il y ait des gens fous et des gens non fous. Il y a des fonctionnements psychiques différents à certains moments donnés, à certains moments de l'histoire… » (S.S.)

9 Il poursuit : « moi, je fonctionne comme les collègues avec un modèle de maladie : il y a des facteurs qui déterminent l'apparition d'une maladie. Il faut reconnaître la maladie parce qu'il y a des symptômes spécifiques pour chaque maladie et ensuite dans l'éventail de traitements qu'on connaît pour le sous type de maladie qu'on met en évidence, on va proposer les traitements qui paraissent le plus adaptés. » (C.S.)

10 Sans que l'aliénation ne soit pensée explicitement comme une perte de liberté. Cette détermination a trouvé des sens distinct selon les pays et selon les courants psychiatriques (Dörner, 1975 ; Gomory et al., 2013). En France, « aliénation » connote une prévalence des passions sur la raison, comme le suggère la catégorie de « folie raisonnante » (Falret, 1866), alors qu'en Grande-Bretagne la notion renvoie plutôt à un biais dans les formes courantes du raisonnement ou au modèle médical. Dans ce texte, nous retiendrons le sens conféré au terme par les psychiatres français interrogés, i.e. d'une perte de ses facultes par l'individu ainsi que de sa liberté.

11 Ces sous catégories soulignent le trait caractéristique principal de la description proposée par les médecins.

12 « Une altération du vécu intime générant de la souffrance », « Un vécu émotionnel altéré générant une souffrance et d'éventuelles difficultés relationnelles et comportementales. » (N.F. dans les deux cas).

13 Nous nous en tenons ici au contexte français car ce motif est apparu antérieurement avec les travaux de Minkowski (1933, 1948) et Binswanger (1971, 1987) plaçant l'attention sur le vécu individuel et l'empathie du soignant.

14 Ce médecin caractérise la maladie par « la souffrance ; à mon avis, c'est la seule façon et c'est différentes façons de montrer sa souffrance. (…) Le déprimé, il montre sa souffrance d'une certaine façon ; le maniaque, c'est une défense contre la souffrance ; le schizophrène… c'est un problème. On sait pas du tout d'où ça vient du tout, là il faut pas croire les généticiens... » (E.G.)

15 « Ce qui est à lui est en dehors de lui » (C.J.).

16 Un functioning peut consister dans n'importe quel genre d'action exécutée, ou d'état réalisé, par un individu, et peut, a priori, couvrir tout ce qui concerne une description complète de la vie de l'individu.

17 « La psychose est caractérisée par la perte du lien symbolique. » (B.S.)

18 C'est-à-dire ayant une syntaxe logique complexe manquant d'une sémantique appropriée à la relation.

19 À eux deux, ces deux types de représentations (les catégories 4 et 5) sont portée par 9 médecins. Certaines approches, issues de l'école de Chicago, les feraient volontiers coïncider (voir Matza, 1969).

20 Nous distinguons les sous entrées « pathologie de la liberté » (2.5) et « pathologie de la relation » (5.1), dans la mesure où la première porte une référence à l'agir et au libre arbitre – centrée sur le sujet – alors que la seconde véhicule moins un rapport à l'action qu'un rapport à des alter ego, à autrui, c'est-à-dire à des instances extérieures au sujet.

21 Cette notion, selon la lecture que l'on en propose, peut figurer comme sous entrée des types 4 et 5.

22 «Si on parle de la schizophrénie c'est une maladie chronique, qui évolue sur des années et qui fluctue aussi. C'est pas identique au fil des mois et au fil des ans, donc avec des moments où le fonctionnement de la personne peut se rapprocher ou peut en tous cas convenir à une société, à la société, et d'autres moments, qu'on appelle de décompensation où il y a justement un plus grand écart qui se creuse entre la vision du monde de la personne et la vision du monde communément admise.» (N.B.)

23 «La vie psychique, c'est la tension entre notre désir d'être comme tout le monde et la certitude que on ne l'est pas, que notre singularité peut pas rentrer dans le truc commun, dans le monde commun et qu'en même temps on a envie d'être vraiment dans le monde commun. (…) La pathologie, c'est quand cette tension s'arrête c'est-à-dire qu'on tombe soit dans une espèce de… il y a tellement de singularité que presque plus rien ne peut être partageable et presque plus rien n'est dans le monde commun, et on ne sait pas comment s'y prendre.» (T.R.)

24 «Je ne suis pas sûre que ça soit toujours de la désorganisation, je pense que parfois ce sont des liens psychiques qui se font et qui sont pas communément admis, qui n'ont pas de sens ; c'est comme s'il y avait une cartographie du monde et une représentation du monde intérieure différente et qui, du coup, amène du coup à des liens qu'une personne non psychotique ne ferait pas et que du coup ça donne l'impression d'une désorganisation de la pensée. » (N.B. ; nous soulignons)

25 «La question de la psychose, de la folie… Elle est entre les gens, la folie est intersubjective. » (S.S.) (S.S.). (5.3) Au cours des entretiens, des allusions à la psychiatrie culturaliste s'expriment26 , soulignant que “ la folie, c'est un concept culturel qui selon les peuples renvoient à des réalités différentes ” (J.M.), sans néanmoins que les réponses ne rejoignent des affirmations dans ce sens aussi fermes qu'on en trouverait dans la littérature, tenant que “ la maladie serait marginale par nature, et relative à une culture dans la seule mesure où une conduite … ne s'y intègre pas. (…) la maladie prend place parmi les virtualités qui servent de marge à la réalité culturelle d'un groupe social ”. (Foucault,1954: 73)

26 « Tout est histoire de contexte et d'environnement et pas seulement d'état clinique pur. (…) Le délire a toujours des conséquences sur le contexte et l'environnement mais les conséquences sont différentes selon le contexte, la culture et ce que veut l'entourage. Dans certains pays, on enchaîne les fous aux arbres et on leur jette de la nourriture. Ici, ça n'est pas comme ça. » (A.M.)

27 Du type : « Une solution que la psyché à trouver, comme compromis, pour tenter de se protéger d'une souffrance psychique » (B.B.).

28 Celle-ci ne porterait à critiques que concernant la sous entrée « approche biologique ou génétique » de la maladie mentale, quoique six médecins ne manquent pas de s'y reconnaître.

29 Caroline Guibert Lafaye. Centre Maurice Halbwachs, École Normale Supérieure, 48, boulevard Jourdan, 75014 PARIS – France. E-mail: caroline.guibetlafaye@ens.fr

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